Tribune « Frigide Barjot : Pour tous! » | Causeur, 26 août 2013
Tribune de Frigide Barjot, parue dans Causeur le 26 août 2013.
L'avenir ne vaut que s'il est partagé par tous. Homos compris.
Depuis le 23 avril, la loi Taubira est votée. Et depuis le 23 avril, l'appareil de La Manif pour Tous ne sait plus où il habite. Les nouveaux dirigeants de LMPT l'ont fait muter en LMPT-SCQSPCN, La Manif Pour Tous-Sauf Ceux Qui Sont Pas Comme Nous.
En continuant d'exiger le retrait pur et simple de la loi Taubira, on joue à faire « comme si ». Comme si le temps s'était arrêté. Comme si cette loi n'avait pas été légalement votée, promulguée et déjà appliquée. Comme si notre mouvement n'avait pas, dès l'origine, mis sur la table la question des droits légitimes des homosexuels.
Pourtant il était convenu de longue date avec l'aile « réseaux-cathos» de LMPT qu'en cas de vote de la loi, on ne se braquerait pas sur l' « abrogation sèche » du texte, désormais impensable même en cas de changement de majorité ! On passerait à la phase 2 du mouvement : la revendication d'une réforme de fond inscrivant dans la Constitution la filiation issue de l'union homme/femme, donc du mariage, et le remplacement du psychédélique « mariage-pour-tous » par une loi d'alliance civile, garantissant des droits égaux à tous les couples en tant que tels, quelle que soit leur orientation sexuelle.
Le 23 avril, cette évolution républicaine de la contestation nous été refusée. Une savante orchestration interne de commandos « anti-CUC1», avec SMS menaçants, lettres anonymes, banderoles et pancartes ad hoc, ont eu raison de notre ligne d'avenir « pour tous », garantie d'origine. Devant l'interdiction de prononcer l'expression désormais blasphématoire d' « union civile », c'est la mort dans l'âme et les larmes aux yeux que j'ai choisi de ne pas venir manifester le 26 mai dernier.